L’appellation Cognac
Issus d’un vignoble de qualité, transportés par bateaux vers les pays d’Europe du Nord, les vins de Poitou, de La Rochelle et d’Angoumois font, dès le XIIIe siècle, le bonheur des Anglais, des Hollandais et des Scandinaves.
La vendange des raisins, la vinification des vins blancs obtenus après quelques semaines, la distillation de mi-novembre à fin mars au plus tard, le vieillissement de 5 à 20 ans voire beaucoup plus grâce à la qualité de la production des tonnelleries traditionnelles, pour, enfin, le plus grand plaisir des gastronomes.
Le vignoble de la région délimitée du cognac, tous crus confondus, compte environ 6 200 exploitations qui produisent du vin blanc des Charentes destiné au cognac. Il est planté majoritairement d’Ugni Blanc (marginalement de Folle Blanche et de Colombard). Ce cépage à maturité tardive oppose une bonne résistance à la “pourriture grise” et donne un vin présentant deux éléments essentiels : un taux d’acidité important et, en général, une faible teneur alcoolique. Depuis la crise du phylloxéra de la fin du XIXe siécle, tous les cépages utilisés sont greffés sur différents porte-greffes choisis en fonction des types de sol.
La vigne est plantée avec un écartement moyen de 3 mètres. Tous les types de taille sont autorisés. La plus utilisée est la “Guyot double”.
Cela se poursuit par les traditionnelles vendanges, le pressurage des raisins et la vinification selon des méthodes naturelles.
Les vendanges peuvent débuter dès que le raisin est arrivé à maturité, en général au début du mois d’octobre (vers le 15 septembre depuis plusieurs années) pour se terminer à la fin de ce même mois. Quelques viticulteurs continuent à vendanger à la main, mais la grande majorité utilise une machine à vendanger. Ces machines, qui existent depuis plus de trente ans, sont parfaitement adaptées aujourd’hui aux exigences des viticulteurs de la Région.
Le pressurage des grappes est effectué immédiatement après la récolte dans des pressoirs traditionnels horizontaux à plateau ou dans les pressoirs pneumatiques. Les pressoirs continus à vis d’Archimède sont interdits. Le jus obtenu est mis à fermenter aussitôt. La chaptalisation (adjonction de sucre) est interdite. Pressurage et fermentation font l’objet d’une surveillance attentive car ils auront une influence déterminante sur la qualité finale de l’eau-de-vie.
Les vins obtenus après une fermentation d’environ trois semaines titrent autour de 9% volume d’alcool. Acides et peu alcoolisés, ils sont tout à fait propices à la distillation.
L’alcool contenu dans le vin est issu de la fermentation des sucres existant à l’état naturel sous forme de fructose et glucose dans les fruits. L’alcool se trouve associé à de nombreux autres composés ; il faut faire un tri parmi ces nombreuses substances. Cette opération se réalise par la distillation. Le principe de la distillation est axé sur les différences de volatilité de ces divers composés. Seules se retrouvent dans l’eau-de-vie les substances volatiles qui constituent les éléments principaux du bouquet.
La distillation du cognac s’effectue au moyen d’un alambic, dit “charentais”, composé d’une chaudière de forme caractéristique, chauffée à feu nu et surmontée d’un chapiteau en forme de tête de maure, d’olive ou d’oignon, prolonge par un col de cygne se transformant en serpentin et traversant un bassin réfrigérant appelé “pipe”.
L’alambic charentais est souvent équipé d’un réchauffe-vin qui répond à un souci d’économie d’énergie. Cet accessoire facultatif permet, en effet, grâce aux vapeurs d’alcool qui le traversent, de préchauffer le vin destiné à être distillé lors du cycle suivant.
Depuis la naissance du cognac, les procédés de distillation n’ont pas changé. La distillation du cognac s’effectue en deux passages dans l’alambic :
1er passage : Le vin non filtré est introduit dans la chaudière et porté à ébullition. Les vapeurs d’alcool se dégagent, s’accumulent dans le chapiteau, s’engagent dans le col de cygne puis dans le serpentin. Au contact du réfrigérant, elles se condensent pour s’écouler sous forme de “brouillis”. Ce liquide légèrement trouble, titrant de 28 à 32 % vol., s’appelle le brouillis.
2ème passage : le brouillis est mis en chaudière pour une seconde distillation que l’on appelle “la bonne chauffe”. Pour cette seconde chauffe, la capacité de la chaudière ne doit pas excéder 30 hectolitres et le volume de la charge est limité à 25 hectolitres.
Lors de ce second passage, le distillateur devra procéder à une opération délicate appelée la “coupe” : les premières fractions qui s’écoulent, très riches en alcool, sont appelées les “têtes” et écartées (elles ne représentent que 1 à 2 % du volume). Vient ensuite le “cœur”, eau-de-vie claire et limpide qui donnera le cognac.
Puis, le distillateur élimine les “secondes” (quand l’alcoomètre indique 60 % vol.) et enfin les “queues” de fin de distillation. “Têtes” et “secondes” sont re-distillées avec le brouillis.
La réussite du cycle de distillation, qui dure 24 heures environ, demande beaucoup d’attention, une surveillance constante et une grande pratique de la part du distillateur qui peut également, en intervenant sur les techniques de distillation (proportion de lies fines, recyclage des “secondes” dans les vins ou les “brouillis”, courbes de température), conférer au cognac des éléments de sa personnalité.
La date limite de distillation des vins blancs destinés à la production du cognac est le 31 mars suivant la récolte.
Les distilleries travaillent jour et nuit pendant les mois d’hiver. C’est une période où les Charentais vivent au rythme des chauffes dans une atmosphère où le feu, le bouillonnement discret de l’alcool, l’eau, le cuivre et les briques se marient merveilleusement.
La confection d’un fût de cognac relève d’une technique ancestrale qui frise la perfection. De la sélection du bois de chêne à l’assemblage des fûts, rien n’est laissé au hasard afin que, pendant de nombreuses années, le cognac prenne le meilleur du fût.
Une eau-de-vie ne peut devenir cognac qu’après une lente maturation dans des fûts de chêne dont le bois aura été sélectionné pour ses propriétés naturelles et sa capacité à les transférer à son contact à l’alcool, lui donnant ainsi sa couleur et son bouquet.
Le cognac vieillit exclusivement dans des fûts en bois de chêne de type Tronçais ou Limousin (rouvre ou pédonculé selon les usages). Ce chêne a été choisi en raison de sa dureté, de sa porosité et des principes extractifs qu’il renferme. La forêt du Tronçais, dans l’Allier, fournit en effet un bois au grain fin et tendre particulièrement poreux à l’alcool. La forêt du Limousin, fournit un bois à grain moyen, plus dur et nerveux, encore plus poreux. Le tanin du premier est réputé pour être particulièrement doux alors que celui du second est connu pour la puissance et l’équilibre qu’il confère au cognac. Une eau-de-vie logée dans des fûts en chêne type “Limousin” peut extraire davantage de tanin.
Les planches de bois à partir desquelles on confectionne le fût, appelées “merrains”, sont prélevées entre le cœur et l’aubier du chêne sur des arbres âgés d’au moins cent ans. Après avoir été fendues pour respecter le fil du bois, elles doivent séjourner environ trois années à l’air libre pour purger leur sève et éliminer l’amertume du bois.
Après cette longue période, ces merrains sont façonnés pour donner des douelles. Le travail des tonneliers peut commencer.
Le tonnelier procède au cerclage du bois, au dessus et autour d’un feu de copeaux et de morceaux de chêne.
La rencontre du feu et du bois régulièrement mouillé permet d’assouplir les douelles et laisse échapper une odeur de pain frais ou de frangipane (l’intensité du brûlage des fûts, appelé “bousinage”, influence largement les caractéristiques des eaux-de-vie). Durant cette période de chauffe, un câble placé à la base du fût est progressivement serré pour que les douelles se rapprochent et, finalement, se joignent entre elles sans que l’on ait eu besoin ni de colle ni de clous.
Après les dernières finitions, on passe le fût réalisé aux épreuves de la solidité et de l’eau bouillante pour déceler les fuites éventuelles. Certains tonneliers continuent à signer leurs “œuvres” afin d’en assumer la responsabilité.
Le vieillissement, opération indispensable pour qu’une eau-de-vie devienne un cognac commercialisable, s’effectue dans des fûts de 270 à 500 litres.
Le cognac est un produit vivant. Pendant son long séjour dans des fûts de chêne, à l’abri des chais, il va s’approprier tout naturellement, grâce à la porosité du bois qui permet un contact indirect entre l’eau-de-vie et l’air ambiant, ce que le bois doit lui donner pour façonner sa couleur et son bouquet définitif..
Ainsi, les substances extraites du bois de chêne par le cognac modifient l’aspect physique du cognac en lui donnant une couleur qui va du jaune d’or au brun ardent.
Ce transfert des caractéristiques naturelles du chêne provoque, avec le temps, la formation du “rancio” et développe le bouquet du cognac.
Le degré d’humidité naturelle des chais dans lesquels les fûts sont stockés constitue, par son influence sur l’évaporation, l’un des facteurs déterminants de la maturation. Quand il existe un équilibre entre humidité et sècheresse, l’eau-de-vie devient moelleuse et vieillit de façon harmonieuse. Cette évolution du vieillissement comprend trois phases principales : l’extraction, l’hydrolyse, et l’oxydation.
L’extraction : L’eau-de-vie nouvelle, stockée dans des fûts neufs, solubilise les substances extractibles du bois et acquiert une teinte jaune d’or. Une partie des composants volatiles s’élimine… Les eaux-de-vie subissent une évolution sur le plan de la teinte (passage progressif de l’incolore à jaune accentué) et sur le plan de la saveur et du bouquet (odeur de bois de chêne avec un caractère très faiblement vanillé).
L’hydrolyse : C’est une phase transitoire qui préfigure une évolution importante des caractéristiques organoleptiques. L’eau-de-vie s’apprête à “digérer le bois”. Sa coloration a tendance à s’assombrir.
L’oxydation : Le goût s’adoucit, l’odeur de chêne étuvé disparaît au profit d’odeurs florales et légèrement vanillées, la coloration s’accentue. Au fil des années, l’eau-de-vie devient de plus en plus moelleuse, le bouquet s’enrichit, on observe l’apparition du “rancio”.
Pendant tout le temps où, dans son fût, le cognac prend le meilleur du chêne pour révéler les saveurs les plus exquises, il va, en étant en permanence en contact avec l’air, perdre progressivement et sans excès sa force alcoolique et son volume.
Cette évaporation naturelle, appelée très poétiquement la “Part des Anges” qui s’évanouit dans la nature représente chaque année environ 2% du cognac stocké : un très lourd tribut que les producteurs n’hésitent pas à payer afin que l’élaboration rime avec perfection.
Ces vapeurs d’alcool nourrissent un champignon microscopique,
le “torula compniacensis”, qui recouvre, en les noircissant, les pierres de la région, leur conférant ainsi une couleur caractéristique aux chais de vieillissement.
Une fois leur maturité atteinte, le producteur / maître de chais décide de mettre fin au vieillissement des eaux-de-vie et procède à leur transfert dans de très vieux fûts de chêne puis dans des bonbonnes de verre, appelées “Dames-Jeanne”, dans lesquelles les eaux-de-vie pourront séjourner à l’abri de l’air durant de nombreuses décennies sans se modifier davantage. Le chai obscur, en général tenu à l’écart des autres chais, où séjournent les eaux-de-vie les plus anciennes s’appelle “le paradis”.
Le travail d’assemblage des eaux-de-vie, fruit d’une grande expérience, permet à chaque producteur de cognac de maîtriser la qualité de son produit. C’est en effet en réalisant des assemblages entre eaux-de-vie d’âges différents (cognacs mono-cru) ou d’âges et de crus différents (cognacs des maisons de négoce) que le producteur (le Maître de Chai dans une maison de négoce) crée, tel un peintre ou un musicien, une véritable harmonie. Entre rigueur, expérience et intuition, il réalise, tout comme le “nez” du parfumeur, de subtils assemblages qui permettront au produit de conserver au fil des ans toute sa personnalité. Un travail d’orfèvre qui permettra à chaque consommateur de reconnaître et d’apprécier le cognac de son choix.
Le Maître de Chai achète des eaux-de-vie et les suit depuis leur sortie de l’alambic. C’est lui encore qui surveille leur maturation, les déguste régulièrement, décide de les changer de fût ou de chai pour les rendre plus moelleuses ou plus sèches, ajoute très progressivement de l’eau distillée ou déminéralisée à l’eau-de-vie pour l’amener lentement au volume alcoolique désiré du cognac commercialisé (40 % vol minimum). Cette opération délicate s’appelle la “réduction”.
Le cognac a une réputation de qualité à défendre dans le monde entier. La recherche permanente de constance de qualité constitue le travail et le souci majeur de chaque producteur de cognac.
Néanmoins, tous les cognacs ne se ressemblent pas. En effet, chaque producteur de cognac tente, par un jeu subtil d’alliance de différentes saveurs, de réaliser un produit capable de séduire nombre d’amateurs.
Avant de découvrir tous les raffinements du cognac, un dégustateur prendra plaisir à rechercher par la vue et l’odorat de précieuses indications.
L’apparence du cognac donne une première indication sur sa viscosité et sa limpidité.
Dès qu’on approche le verre du nez, les parfums les plus volatils s’échappent : c’est le montant.
Après un mouvement délicat de rotation du verre, c’est l’essentiel du parfum du cognac qui apparaît. On y retrouve des odeurs florales ou fruitées telles que : tilleul séché, fleur de vigne, sarment sec, raisin pressé, violette, vanille, … c’est le second nez.
C’est au contact de la langue et du palais que le cognac révèle son identité. Ses arômes savants, qui participent à l’apparition du bouquet se combinent avec sa saveur pour donner le goût par la voie rétro-nasale et gustative. Le consommateur perçoit dès ce moment tout ce qui fait la personnalité du produit : rondeur, moelleux, onctuosité, finesse, légèreté, fierté, rancio, harmonie… autant de sensations qui permettent de reconnaitre et d’apprécier son cognac préféré.
Si l’amateur déguste le cognac pour son plaisir, les professionnels utilisent également la dégustation comme outil de travail.
En effet, elle constitue, en complément des analyses chimiques, la méthode la plus fiable pour sélectionner, apprécier et proposer aux consommateurs des produits à la qualité irréprochable. Il s’agira donc, grâce à cet examen sensoriel, de contrôler les différents stades de la distillation, de suivre l’évolution du vieillissement, ou encore de réaliser les assemblages nécessaires à l’élaboration du cognac et, enfin, d’apprécier les caractéristiques du produit final.
Nature, en long drink ou en cocktail, découvrez les différentes facettes du cognac…
A la fin d’un repas, vous éprouvez le besoin de prolonger un moment privilégié. Appréciez alors à sa grande valeur, un cognac servi seul dans un verre “tulipe” ou “ballon” et prenez votre temps pour découvrir la richesse de son arôme et ses subtiles saveurs.
Le cognac peut également vous surprendre. En effet, marié harmonieusement avec du jus de raison pétillant, de l’eau pétillante ou du tonic, il vous désaltèrera, à l’occasion, par exemple, d’un apéritif entre amis. Ces nouveaux modes de dégustation sont déjà mondialement appréciés notamment aux États-Unis et en Asie, continent où le cognac peut être, le même jour, le long drink apaisant d’un après-midi d’été et la boisson principale d’un repas raffiné.
La richesse du cognac en saveurs et en arômes permet d’en tirer plaisir dans de nombreuses circonstances car il peut apporter une note inimitable à toute sorte de plats.
Il y a naturellement tout ce que l’on peut flamber au cognac, comme par exemple le homard, les noix de Saint-Jacques ou les gambas. Aussi, quelques gouttes de cognac peuvent délicatement transformer une sauce simplement excellente en parfaitement sublime.
Il y a des plats plus traditionnels comme l’agneau, le magret de canard ou le saumon auxquels une subtile note de cognac enrichira chaque met d’une touche fine et raffinée.
Et puis il y le cognac et les desserts, un mariage qui selon les goûts, sera plutôt classique avec les truffes au chocolat, les bavarois, ou au contraire, plus osées avec par exemple le pain d’épices.
Avec le cognac, ce sont à la fois l’esprit et le palais qui s’ouvrent vers de nouvelles sensations, des saveurs uniques.
Texte : Copyright © BNIC (Bureau National Interprofessionnel du Cognac) : www.cognac.fr
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